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Tassaft  Ouguemoune
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Tassaft Ouguemoune

VIP-Blog de tassaft
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  • Créé le : 05/09/2006 02:21
    Modifié : 10/02/2016 04:36

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    Instantané de la guerre de libération .

    21/01/2008 00:52

    Instantané de la guerre de libération .


    Je me souviens très bien de ce jour, vers les années 1960. Alors que nous campions tous ensemble, mes frères et mes cousins, au champ dit Tamazirt – sur le versant sud du village Iferhounène – à 150 m seulement face au camp du même nom.

    Nous étions en train de garder l’unique chèvre qui restait de notre bétail, de notre fortune laissée par nos parents, happés par le colonisateur, lorsqu’une compagnie complète composée de soldats français d’origine européenne et de quelques harkis notoirement connus passait juste devant nous, en colonne, en direction de leur bivouac. Le hasard n’a pas pu éviter l’événement sempiternel de se produire à ce moment précis, cette chamaillerie qui mettait souvent aux prises, de façon presque cyclique tel un syndrome pathologique, mon cousin Yazid, 10 ans à peine et, son frère Messaoud, 8 ans.– la bataille faisait déjà rage entre les deux frères ennemis quand les premiers soldats venaient de franchir l’endroit où nous étions surpris par cette file indienne de roumis égrenée de harkis. Messaoud, mon cousin l’intrépide, le nerveux aux réactions épidermiques, a la mémoire prodigieuse – il avait tout de même et surtout une facilité déconcertante à retenir les noms des personnages célèbres ou de ceux de larrons que des événements ont rendus tels, à des occasions exceptionnelles.C’est ainsi qu’il pouvait retenir dans sa petite mémoire d’enfant indigène non seulement tous les noms des harkis de la région mais aussi et particulièrement des hauts gradés du FLN et de l’armée française de l’époque – nous étions déjà en 1960 – et notre enfant terrible n’avait que 8 ans – soit deux ans de moins que nous-mêmes. Des noms comme celui de De Gaulle, de Lacoste, ou encore Eisenhower (Américain) n’avaient aucun secret pour lui. Messali Hadj, Abane Ramdane ou autres, non seulement il les connaissait très bien mais il pouvait leur adjoindre les caractères saillants de leur personnalité, de leur physionomie. Ainsi, De Gaulle, pour lui, était très long et avait un nez qui était hors du commun. Il disait souvent pour ironiser à quelqu’un qui le contrariait qu’il avait le nez de De Gaulle. Ou bien encore les yeux de tel autre personnage. Mais celui dont il finit par adopter définitivement le nom pour en faire une idole, au point de ne jurer que par sa tête, était le redoutable Amirouche, connu sous le surnom deu Lion du Djurdjura – pour lui les héros ne meurent jamais, quelle que soit la puissance de leurs ennemis. Cet enfant intrépide, qui ne se souciait de rien, n’a pas raté l’occasion inespérée, à ce moment précis, à l’endroit même où la compagnie venait de passer devant nous à quelques mètres seulement, pour se mettre à gueuler en vidant sa colère incontenable sur son frère qui le taquinait, en ces termes, à très haute voix et de façon très distinctive : « Je jure sur la tête de Amirouche que je vais te tuer, oh Yazid de m… ! Je vais d’écrabouiller ton portait de Mohand ath M., harki ! Va, tu n’es pas mon frère, tu es plutôt le frère à Ouali Ath O. ! » Cette avalanche de mots, débités sans interruption à voix porteuse, n’a pas manqué d’attirer le regard de tous les soldats qui étaient à proximité du lieu où se déroulait la bagarre entre les deux ennemis et non moins frères de père et de mère. A cet instant précis – et comme à la parade, tels des joueurs de baby-foot guidés par le même mouvement – tous les regards se tournèrent brusquement vers l’endroit d’où fusait ce terrible nom de Amirouche, d’une voix aigue et vibrante en même temps. Une sorte de réflexe conditionné avait saisi subitement la file de soldats qui s’étaient retournés comme s’ils s’apprêtaient à découvrir soudain ce redoutable guerrier en face d’eux, surgir de derrière un arbre, ou à travers un mur de ces mechtas alignées face au camp. J’avais deviné que tous les soldats F.S.E et F.S.N.A, tous grades confondus ou simples hommes de troupe, connaissaient parfaitement le terrifiant nom de Amirouche. Enfant indigène de surcroît inculte que j’étais à cet âge car, privé de tout, j’avais vite compris l’ampleur du combat que livrait ce redoutable guerrier à une puissance pourtant surarmée. J’ai surtout compris que la suprématie, dans un conflit armée, ne résidait pas seulement dans la puissance de feu mais qu’aussi dépendait de l’audace et de l’intelligence des chefs militaires. En un mot, de la stratégie dans la manière de livrer bataille à son ennemi. C’est cela la guérilla. L’onde de choc qui s’était répandue au sein de cette compagnie était telle que, nous, enfants insouciants, étions d’un coup saisis de perplexité – une atmosphère de méfiance, inexplicable, contagieuse s’était soudainement répandue autour de nous, suivie d’un silence effrayant tant du côté de tous ces éléments de l’armée d’occupation que du côté de ces enfants indigènes que nous étions – tous âgés entre 7 et 10 ans. Nous avions tous compris à ce moment-là, soldats français et enfants de fellaghas que nous étions, qu’un monde séparait nos deux cultures, et surtout nos deux philosophies, nos deux religions. Ils sont les envahisseurs, nous sommes les autochtones, les propriétaires des lieux. Ils sont là pour nous asservir, nous exploiter, nous voler, nous martyriser. La terreur du colonel était le remède au système inique, violent, criminel, qui s’installait progressivement dans notre pays. Cela fait 4 ans déjà que le camp d’Iferhounène a été installé chez nous, la situation allait pour nous de mal en pis : frères et pères tués, oncles emprisonnés, biens saccagés, il ne subsistait pour nous que les chamailleries de frères et sœurs livrés à eux-mêmes et sans ce précieux intermédiaire conciliateur, nos pères. Il ne restait pour nous que la guerre, sans autre issue que la mort. Mon père avant de mourir nous a légué cette phrase lapidaire : « Maintenant que Amirouche est mort, qu’il ne subsiste aucun d’entre nous ! Mourrons tous, car c’est l’unique alternative qui nous est laissée. Le colonialisme vit au détriment du colonisé. Il l’avilisse, il le martyrise, il l’appauvrit, en un mot le détruit progressivement. » Nous, enfants indigènes et aussi enfants de fellagas, étions prédestinés à une autre vie, pas celle de pacifiés, assimilés aux Européens. Nous sommes mis dans un état de rébellion pathologique par les conditions de dénuement total qui nous sont imposées par l’envahisseur. L’école française que nous avions commencé à fréquenter n’a fait que réveiller en nous les braises d’un feu mal éteint : la haine de celui qui nous a privé de tout : d’abord de l’affection de nos pères, ensuite des moyens de survie. Nos biens ont été lapidés et nos maisons confisquées. La puissance coloniale aura réussi à reproduire en nous, enfants innocents, ce que, eux, appellent par confusion délibérée, préméditée, des futurs terroristes que par conséquent, il faudra, tôt ou tard, penser à éliminer. Des rebelles à vouer à la corvée de bois. La corvée de bois ! Quelle subtilité barbare ! Comment l’esprit d’enfants d’indigènes insouciants peut-il admettre que l’on puisse montrer sa force, sa puissance devant un homme sans arme et, par-dessus tout, faire croire à l’humanité toute entière, à l’histoire de l’homme, que le condamné, victime d’une exécution préméditée, sans aucun jugement, qu’il a tenté de fuir. Pis encore, l’infortuné est tué avec cet espoir d’être libéré pour retourner à ces enfants chéris qui l’attendent pour continuer à vivre. Comment des dirigeants d’une puissance militaire, d’une nation qui a vu naître et grandir les droits de l’homme, puissent-ils admettre que de tels crimes aient lieu sous leur commandement ? Peut-être avaient-ils été les commanditaires ? Quelle grandeur pourrait-on reconnaître à ces stratèges politiques et militaires qui ont été formés dans les écoles de Victor Hugo, Ronsard, Montaigne, Voltaire et Pascal ? Mon Dieu, quelle sauvagerie est cette culture occidentale ?! Et ces soldats français, dont la plupart avaient moins de 30 ans, peut-être à peine 20 ans, malgré proches de nous, en tant qu’êtres humains pensants, n’avaient-ils pas d’autres alternatives que celle de nous réduire à néant. Ils étaient en fait conditionnés pour cette mission. Il ne faut pas leur en vouloir, car moi-même j’ai été jeune, et de surcroît orphelin et fils de fellagha, je ne suis pas un saint, et pourtant, je me souviens que mon seul péché était de dévaliser l’école primaire de ses plus jolis livres pour en arracher les images. Rien que cela. Je n’ai pas tué et préfère pour cela mourir que de mettre fin à la vie d’un être humain. Ces jeunes Français appelés sont, pour la plupart, comme moi, j’en suis sûr. Pour preuve, des soldats dont je n’ai retenu que le prénom ont pris notre partie. Guy, Marcel, Robert, Madame Boucher, femme d’un non moins lieutenant de la SAS étaient des soldats français FSE. Ils nous ont protégés et protégé nos mères et nos sœurs. Cette compassion des appelés français, enseignants, m’a évité de faire la confusion plus tard entre les crimes, les nazis et les soldats français et réussit à faire la part des choses. De ce côté-là, paradoxalement, tout en étant musulman entier, j’applique le commandement qui est pourtant adressé aux chrétiens : tu ne tueras point ! Ces soldats FSE prendront assurément conscience de leur erreur plus tard… quand le moment de la remise en cause inéluctable viendra. L’heure de vérité sonnera pour eux quand ils seront proches du tombeau et feront leurs adieux aux vivants ici bas. Mais que dire alors des harkis qui ont choisi, volontairement, ou sans se rendre compte, de se positionner contre leur propre peuple, leurs propres frères, pour défendre une cause perdue d’avance, une cause injuste, des intérêts d’une nation en proie aux difficultés socio-économiques. Et même les citoyens français, engagés temporairement, n’arrivaient pas à justifier vis-à-vis de leur conscience leur engagement, leur prise de position en faveur de l’Algérie française. Ils étaient et continueraient à mourir pour certains pour des idéaux, des enjeux qui ne les touchaient ni de loin ni de près. Ils servaient un système qui perpétuait la domination et la servitude des hommes favorisés et bien servis par le système non moins exploiteur, non moins injuste et non moins ingrat déjà à l’égard de ses propres membres qui s’efforcent en vain de croire, malgré eux, en l’honneur de la France dans cette affaire d’extermination d’autres hommes, d’asservissement d’autres femmes et d’enfants d’un pays soumis par la force et la tyrannie, le leur qui leur a volé leur jeunesse, pour un résultat inutile. Pis encore !déshonorant. Pour ces Français, harkis ou fellaghas, ce sont les mêmes doigts d’une seule main qu’il faut, à défaut d’exploiter, éliminer. Le colonialisme porte en lui les germes de sa propre négation. Amirouche était devenu un dieu dans l’esprit de ces enfants indigènes, orphelins, ou privés de l’affection de leurs pères croupissant dans les geôles depuis déjà plusieurs années. Ils seront les futurs fellaghas, si la guerre venait à perdurer. Le cas de 7 enfants alignés là devant cette puissante compagnie de chasseurs alpins, avec à leur tête un lieutenant foudre de guerre, livrés à eux-mêmes, se chamaillant pour briser la domination de leurs aînés, sous l’œil indifférent de ces chefs de guerre, roumis, mais ébranlés par cette culture terroriste qui classe l’enfant indigène kabyle déjà dans sa destinée de futur fellagha, l’opposant du coup à celui des harkis. C’est cela ce que la propagande coloniale appelle l’opposition ou le conflit fratricide. Les noms de harkis tels que Doumra, Ouali Ath O., Mohand T., Mohand Ath M. étaient déjà entrés dans le langage populaire, mais comme des surnoms chargés de tout leur poids péjoratif et il n’était pas surprenant de vous entendre, en ces temps de guerre, être surnommé par des noms authentiques mais usés comme simple sobriquet. Amirouche, même mort par contre comme, disait Conroux, continuait de faire peur. C’est le symbole de la justice forte, efficace et opposée à la force tyrannique du colonisateur.

    L’auteur est retraité

    Source : http://www.elwatan.com/spip.php?page=article&id_article=85094

    Abdenour Si Hadj Mohand



    Commentaire de sihadj.abdenour (25/02/2008 00:16) :

    Guerre d’Algérie 1954-1962 Accrochage à Iril El Arvi Iferhounéne Eté 1961, toute la région d’iferhounéne était plongée dans le noir d’une nuit fraîche sans étoile, ni clair obscur. À 150 mètres seulement du village est posté depuis 1956 le camp des chasseurs alpins entouré de fils barbelés et quadrillé aux quatre coins cardinaux par des blockhaus. Régulièrement les soldats roumi, accompagnés de supplétifs autochtones, venaient visiter le village non pas pour un Salem alikoum (1) plein de courtoisie pour ces kabyles à l’hospitalité légendaire, mais bien pour s'adonner aux fouilles et aux interrogatoires d’une population déjà fortement ébranlée par les premières exécutions sommaires et les fréquentes attaques nocturnes des éléments solidement armés du redoutable colonel Amirouche. (1) Salem alikoum : que le salut soit sur vous Cette horde de fse et fsna, vient souvent la nuit arracher brutalement à leur sommeil profond, ces montagnards innocents, primitifs j’allais dire sans aucune connotation péjorative. La trouille, la faim, le froid règnent déjà en maîtres absolus dans cette atmosphère de guerre, de mort. Cette nuit, ils étaient nombreux, ces fsna envoyés en renfort à partir de Palestro (2).Ces soldats français d’origine algérienne, on les appelait ici chez nous, les Imnouchens (2). (2) imnouchens : c’est le nom en kabyle donné aux supplétifs de la région de Palestro ( Lakhdaria) qui sont dispatchés sur d’autres régions de Kabylie Ces imnouchenes, vont se fondre dans cette compagnie composée de plusieurs sections de FSE, FSNA, et de harkis originaires des villages avoisinant. Il y en aurait même de nos voisins, sans doute un peu trop jeunes pour se manifester de façon agressive. Cette nuit qui restera gravée dans la mémoire de tous ces indigènes kabyles Sera témoin pour l’histoire de la Kabylie d’un violent accrochage entre fellaghas et les éléments supplétifs fsna, ces imnouchens, encadrés par les chasseurs du lieutenant HEIM. A contrebas du village iril El Arbi (Ath ARVI en kabyle) à 1 km à peine à vol d'oiseau et à moins de 3, en empruntant la piste carrossable et sinueuse, un dur accrochage venait de se produire, opposant un groupe de maquisards retranchés dans une grotte au lieu dit thilmanthine (3), aux militaires français qui les avaient encerclés. (3) thilmathine : champ situé à contrebas du village ATH ARVI, et surplombant le village TIKILSA, sur le trajet de l’oued Tirourda.Ce nom de camp, comme, il est courant chez les kabyles, est donné pour signifier les prairies. Cet accrochage va mobiliser des renforts militaires mais aussi des hommes kabyles puisés dans la population civile. Le repère des fellagas cerné, mis dans un état de siége, attendait des renforts et des munitions du camp d’iferhounene. Il était à peine 6 heures ou 7 heures du soir. Une section complète des chasseurs alpins, dans laquelle figurait le redoutable harki du nom de Mohand T s’est déplacée au village vers 8 heures du soir pour réquisitionner, hommes et bêtes de somme, et mon frère abdallâh, Houche Tahar, Si Hadj Mohand s, Belkadi A, Samer M feront partie du lot. Ils seront sans doute utilisés comme instruments, moyens ou Simplement comme chair à canon dans cette sale besogne : assurer l’acheminement des caisses de munitions, et des rations alimentaires pour ces embusqués dans la forêt au pied du piton sur lequel de loin, nous apparaissait, perché au sommet, le village Iril El Arbi. (4) (4) Iril El Arbi : nom donné par la France coloniale au village kabyle ATH Arvi , situé entre les villages de Soumer et Iferhounéne. Le chemin emprunté, accidenté, s’étirant sur un relief escarpé, avait été bifurqué sciemment pour éviter tout accrochage ou embuscade qui seraient provoqués par la présence d’éventuels groupes de fellaghas qui font légion dans cette partie du territoire. Le convoi doté de bêtes de sommes devait emprunter un itinéraire des plus irréguliers, pour tromper sans aucun doute la vigilance des guetteurs kabyles qui se sont montrés très efficaces dans leurs missions courageuses et dangereuses. Au départ du village, le harki notoirement connu en l’occurrence Mohand T. commençait à proférer des menaces en direction de mon frère Abdallâh qui devait avoir à cette époque à peine 17 ans. Il avertit d’emblée les autres supplétifs et harkis en le désignant tout de go, qu’il ne fallait , en aucun cas faire confiance à un frère doublé de fils de fellagha, à ce jeune à la tête dure et dont les prédispositions à devenir terroriste ne trompent personne. Son frère, son père, son oncle et ses neveux sont des maquisards de première heure, et tous sans exception ont été abattus, pour le grand bonheur de la France coloniale certes mais non pour ce harki qui se bat pour une cause perdue d’avance au mieux, au pire pour un idéal qui n’en est pas un. On s’avisa, bien sur , vite de l’isoler du reste du groupe de civils kabyles réquisitionnés pour cette opération - le harki Mohand Précisait de plus en plus sa menace de tuer mon frère dans le cas ou il ne coopérerait pas. Il s’adressa à lui en ces termes, pour, d’abord le terroriser : - « Avec la volonté de Dieu, ce sera aujourd’hui ton dernier jour. tu ne reviendras pas vivant de cette opération. je te le promets » La réponse de mon frère ne s'était pas faite attendre et , le moins que l’on puisse dire est qu’elle était chargée de toute la rage et du dégoût que l’on doit à cet ennemi , le colonialisme français ,qui l’avait déjà privé de tous les soutiens dont il pouvait avoir besoin dans pareilles situations de guerre : son frère Chérif tué en 1957 au village Mahmoud , son père Hanafi , froidement assassiné , sa tante Zineb , tuée dans une embuscade ,à Ait Ouatas lors de l’opération jumelle, son oncle Mohand Ouamar tué dans un accrochage non loin de Bouessaoud , à la même époque , son neveu Mbarek également tué dans une embuscade non loin de ichariden en 1960. Sa voix se fit alors défiante, entrecoupée de sanglots, il perdit à ce moment, toutes ses inhibitions devant cet ennemi ignorant le bon sens et la logique des choses. Il cracha alors son dégoût dans un ultime courage d’un jeune homme dont on s’attelait à briser la personnalité, la virilité, l’existence même en tant qu’homme. Son équilibre psychologique risquait alors de prendre un coup, et il ne pourrait s’en remettre de cette épreuve qui était faite pour le marquer à jamais, s’il s’en sortait vivant. C’est le traumatisme irréversible, ce que les stratèges coloniaux font passer dans leur opinion publique en usant de termes cyniques, effrontés et éhontés : les dégâts collatéraux. Il était dans un état second , et il avait un instant perdu tous ses freins psychologiques,et dans une sorte de prière adressée à Dieu ,pour une dernière fois , s’adressant au harki qu’il arrosa copieusement de paroles assassines ,mais néanmoins venues du fonds du cœur : - « Si Dieu le veut bien, tu périras avant moi ! Oh Mohand T. Je suis très confiant en Dieu, et quelque chose me dit que tu seras mort avant moi. Donc je survivrai bien longtemps à toi. Tu auras tout le temps de le vérifier ». En effet, la suite des événements, et l’avènement de l’indépendance nous confirmerons que cette prière sera non seulement entendue mais qu’elle sera exaucée dans des conditions horribles. Dieu n’a t-il pas été clément envers les égarés ou bien a-t-il réservé au péché le châtiment idoine ? A cette réplique Mohand T réagis avec stratégie pour se venger de ces offenses venant d’un fils de fellaghas, d’abord en encaissant le coup, et ensuite en tentant d’exposer sa victime à la vindicte des harkis, fsna et fse tous confondus. Les soldats présents, emportés par le manége de Mohand T qui avait mis toute la force de ses arguments et son énergie pour attirer la méfiance sur lui en le présentant comme un fils, également un frère, ensuite un neveu de fellaghas. puisque toute la famille est considérée « famille de fellagas ». En effet cela se justifiait amplement dans les faits. Les arguments que ce harkis haineux avait déployés ne nécessitaient pas trop d’efforts et valaient autant de preuves irréfutables, pour être acceptés, avalés même sans difficulté par cette bande très encline à tuer tout ce qui leur paraissait à leurs yeux, de prêt ou de loin, ressembler aux fellaghas, dans ce bled qui, pourtant les a vus naître et souffrir et grandir. Il finit donc par faire admettre aux autres soldats que ce jeune Abdallâh n’était autre qu’un indicateur des « fels » (5), et donc un futur fellagha en puissance. (5) Fels : diminutif de fellaghas : mot utilisé par les colonialistes pour designer les maquisards algériens. les artisans de la colonisation usent beaucoup de termes méprisants comme : fellouzes, les rebelles, les terroristes. On isola abdallâh des autres et on l’attacha à un des ânes qui ont servi à transporter les munitions et les provisions alimentaires sur les lieux où se déroulait le bouclage. toute la nuit durant , tout ce monde attendait le lever du jour pour lancer une offensive sur les éléments FLN , encerclés depuis déjà plus de 24heures, retranchés dans ce trou qui surplombe la position des militaires de l’armée française., sans que ceux ci puissent les atteindre.. Un véritable siège qui a duré jusqu’au matin. Les 3 maquisards ne pouvaient alors s’échapper du trou dans lequel ils s’étaient terrés. A ce moment, les éléments qui encerclaient la grotte se mettent à attaquer nos 3 djounouds usant d’un feu nourri de toutes leurs armes y compris le gaz asphyxiant. « Les rebelles » acculés sans doute par la puissance de feu et bientôt la raréfaction de l’air à l’intérieur de la grotte à cause de la fumée qui avait envahi l’atmosphère. gênés dans leur respiration par les gaz,ils se sont mis à tirer presque au hasard et subitement, nous voyons, l’un d’eux surgir du trou de la grotte, donnant l’impression d’être éjecté, propulsé par une catapulte. Il fut accueilli en l’air, par un feu nourri. Et pendant qu’il culbutait dans l’espace, il tressautait à l’impact des balles des armes qui continuaient à déverser sur lui un déluge de feu. Il continua son vol plané sur une distance de plus de 100 mètres pour atterrir dans une cuvette, une sorte de bassin rempli d’eau de rivière d’une profondeur de 1 mètre. On pouvait alors très visiblement distinguer le corps de cet homme de corpulence, Ouazzeddine, un natif de Taourirt BOUDHELES, un village non loin de TIFILKOUT. Mitraillette aux poings, il atterrit au sol la tête en bas et les pieds en haut, au bord du bassin du roumi, en kabyle thamdha ouroumi (6) sa mitraillette lui ayant échappé des mains ira se flanquer contre le talus, quelques mètres plus haut que son corps terrassé par les balles assassines qui ne cessèrent de lui transpercer le corps. (6) Thamdha Ouroumi : traduit littéralement : la mare du Roumi, un espèce de bassin naturel formé dans l’oued Tirourda. À cet endroit la profondeur de l’eau pouvait atteindre pus d’un mètre. A ce moment, Plus aucun tir, un silence macabre envahit l’atmosphère. On obligea alors mon frère à descendre au fond de la rivière ou gisait le corps inanimé du moudjahid.un homme robuste ,80 kg, beau, perdant son sang dans le bassin débordant d’eau de rivière. Il devenait de plus en plus clair,et sa peau prenait une couleur argentée, en même temps que son visage s’illuminait,pour donner l’impression d’un enfant qui dormait d’un sommeil tranquille, un bébé détendu , à qui ne maquait que le sourire pour rayonner de toute son innocence et sa splendeur. Il venait de nous quitter, pour de bon, et les multiples tentatives pour le remonter au niveau du groupe qui juchait au-dessus de la tête de Abdellah, mon frère, ont été vaines tant cet homme paraissait, à cause de l’effet de l’inertie, peser plus de 200 kg. d’une part , et le relief escarpé ; ne permettait même pas d’essayer de crapahuter avec un poids de cette taille sur le dos, d’une autre part. On commença alors à lapider mon frère du haut du talus, en se moquant de lui. Pendant qu’il essayait en vain de remonter ce corps qui, maintenant a perdu tout son sang et, devenu très clair et brillait à la lumière du jour, on dirait un poisson argenté qui scintille aux rayons du soleil, on ordonna à mon frère de desserrer la ceinture du mort et de récupérer ses rangers.Ce qu’il fit sans protester. Pendant ce temps, les harkis continuaient de lapider, en bas, mon frère. On lui demanda de reconnaître le fellagha.en vain. Mohand T s’improvisa alors meneur de l’interrogatoire : - « le connais tu ? » demanda t il à mon frère. - « non ! » lui répondit il, sèchement. Vers 10 heures trente, arriva alors sur les lieux, le lieutenant Boucher en provenance du camp…. Il vint immédiatement aux informations.Un compte rendu rapide lui fut fait par les harkis zélés. Et c’est à qui narrer les faits le plus promptement au lieutenant. : 3 MORTS, dont 2 par asphyxié à l’intérieur de la grotte. Tous fellaghas armés. deux seront vite identifiés par nos villageois sans que les militaires n’aient obtenu de précision : Hormis celui dont nous avions parlé plus haut , enl’occurrence Ouazzeddine , le deuxième , Ali serait d’origine de Ait NZER , un village non loin de Ahdouche.Quant au troisième personne ne pouvait donner une quelconque indication à son sujet.Observant la situation lamentable dans laquelle se trouvait ce jeune kabyle de 17 ans, mon frère en l’occurrence, Le lieutenant qui venait d’arriver a vite compris qu’il pouvait être en danger de mort. , en voyant l’acharnement des soldats fsna.il ordonna alors à tous les soldats de cesser ce manège. Quelques Imnouchens continuaient cependant de lapider donnant l’impression de se ficher royalement de leur supérieur. Pris dans un accès de colère, le lieutenant menaça alors quiconque continuerait de lui désobéir. il ordonna que l’on cessa toute agressions contre mon frére.il prit alors l’initiative du commandement et demanda du haut du talus, à Abdellah , pendant que ce dernier continuait à tenir compagnie au cadavre du fellagha : « est ce que vous pouvez comprendre ce que je peux vous dire ? ».MOHAND T s’empressa de traduire en kabyle les paroles du lieutenant en assortissant ces paroles de menaces. « Il te demande est-ce que tu vas répondre à ses questions en disant la vérité ? » Réponse de mon frère Abdellah en kabyle : - « mon lieutenant, il veut me tuer ! » Le lieutenant Boucher : - « demande lui de choisir quelqu'un pour lui traduire ce que je dis ».on lui expliqua ce que venait de dire le lieutenant .Il s’empressa, cependant de répondre toujours en langue kabyle : - « expliquez à mon lieutenant que je ne peux accepter comme interprète ni Mohand T ni Y.M, Ni BM, » Le lieutenant : - « alors qui veux tu prendre comme interprète pour te faire comprendre ? ».Et mon frère Abdellah de répondre : - « je veux que ce soit Mohand Ouidir Ath M qui traduise ce que je dis au lieutenant et qui m’explique ce que me réponds le lieutenant" » Alors le lieutenant commença à poser ses questions - « pouvez vous reconnaître le corps de ce fellagha mort qui est devant vous ? » Le supplétif MOhand Ouidir Ath M traduisit cette phrase non sans encourager mon frère : - « Écoute !il te demande si tu connais cette personne qui gît devant tes pieds, vas y parle ! Ne soit pas effrayé. Tu n’as rien à craindre. J’arrangerai la traduction. Il te suffit de remuer les lèvres, le reste je m’en occupe » En même temps qu’il traduisait Mohand Ouidir Ath M. encourageait mon frère.Reprenant son courage à deux mains, mon frère finit par dégeler sa situation et se mit à déverser toute sa rancune sur ce supplétif, qui lui avait jusque là rendu la vie très dure, en l’occurrence Mohand T, puisque l’occasion d’or venait de lui être offerte par ce harki et non moins patriotique Mohand Ouidir ath M. Pris dans cet élan sentimental, il finit par se hasarder dans une aventure de discrédit du terrifiant Mohand T. - « écoute Mohand Ouidir Ath M , je te demande de traduire intégralement ce que je vais dire au lieutenant Boucher , que j’ai été frappé et menace par Mohand T. dis lui qu’il a juré de me faire la peau, vas y traduit, je t’en supplie Mohand Ouidir ! » Sans attendre la traduction, le lieutenant avait saisi quelques mots qui pouvaient suffire pour comprendre le danger qui guettait mon frère. Suite à cela, il ordonna ferment à tous, en martelant ses mots : - « je vous avertis cette fois, que s’il lui arrive quoique ce soit à ce jeune, vous me le payerez très cher ». Le lieutenant savait tout sur mon frère. Quand on est lieutenant de SAS, inutile de se faire narrer que ce jeune Abdellah était bel et bien issu d’une grande famille de fellaghas. Il savait que le qualificatif dont l’affublait le Harki , le futur fellagha , disait il à qui veut l’entendre, n’était qu’une psychose d’un individu qui se sentait rangé du coté d’une cause qui n’était pas la sienne, et, qui plus est, cette cause ne pouvait le servir dans l’avenir. Mohand T avait senti, ce jour que le pouvoir ne lui appartenait pas et que ses méfait, sa capacité de nuisance étaient, tout de même, limités par L’ordre colonial qui, lui, avait un autre objectif, un autre dessein que de satisfaire l’esprit agressif et belliqueux d’un kabyle faible d’esprit, ignorant ses origines et n’envisageant aucune perspective claire d’avenir pour ses propres idées si tant est qu’il en avait quelques unes. L’histoire retiendra également que ce supplétif zélé ne profitera pas des effets positifs de la France coloniale Extrait du livre « Kabylie : la guerre vécue » 1954-1962 Du même auteur : 1. fils de fellagha 2. La guerre franco algérienne dans la poésie populaire kabyle 3. la guerre vécue par un chasseur alpin en kabylie 4. les troupes du colonel Amirouche 5. la Kabylie : la guerre vécue-1954-1962 www.publibook.com

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    Commentaire de sihadj.abdenour (29/02/2008 01:32) :

    9 Préface Un chasseur alpin raconte sa vie. Un fils de « fellagha » raconte la sienne. Ce qu’elles ont de communs, ces deux existences : le lieu du déroulement du drame, Iferhounéne, un village kabyle posté depuis l’ère des quinqué gentii1 sur un mamelon qui fait face à l’imposante chaîne du djurdjura. En y installant leur camp dés 1956, les forces d’occupation avaient visé un objectif stratégique, inspiré de la nature même du relief escarpé et de la position dominante du chef lieu de cette portion du territoire algérien : Observer les mouvements des villages environnants : Tifilkout, Ait arbi, Ait Hamou, Ait Mansour, Barber, Taourirt Ali Ouanacer, Tikilsa. Quant à Haadouche et les autres, même cachés, ils ne seront qu’à quelques minutes de marche de là, à portée de canon. Jadis panorama touristique pittoresque, le Djurdjura allait, des années durant, offrir une image apocalyptique ou se mêlent tous les malheurs d’un peuple marqué par son histoire déjà trop agitée : batailles sanglantes, embuscades, ratissage …torture, viols, exécutions sommaires. Le chasseur et le fils de fellagha, ont passé ensemble une partie de leur vie, face à face, chacun de son coté de la barrière… Du barbelé qui sépare le village du camp militaire. Sans se connaître, ils ont vécu les mêmes événements historiques qu’ils ont ressentis chacun à sa 1 quinqué gentii. Terme romain, utilisé pour designer les 5 premières tribus berbères installées au flan DJURDJURA, appelé par les romains, Mons Ferratus ou montagne de fer, en raison de la résistance farouche opposée à l’occupant. 10 manière, selon ses propres convictions. Différemment, voire parfois même antagonistes, malgré le point commun qui peut rapprocher les hommes dans certaines circonstances, dans leur pensée, deux hommes épris de paix et de justice. Dans la première partie de cette oeuvre ; Le chasseur alpin, nous livre les secrets de cette courte période de son service militaire, passée à livrer bataille malgré lui, à un ennemi invisible, au lieu disait-il, de séjourner en touriste insouciant dans ce qu’en métropole, on appelait, fanfaronnerie ironique « les vacances algériennes. » Je ne dirai rien de sa vie privée, et ne porterai aucun commentaire sur ses sentiments exprimés, dans ce livre qui a le mérite de nous dire des choses authentiques, sans détours, sur le drame vécu par le peuple algérien. Si l’histoire est authentique, les noms des acteurs ont été changés sciemment pour des raisons évidentes de respect de la discrétion. Mais cela ne leur enlève en rien, la reconnaissance du mérite ou la condamnation de l’opinion. Nous laissons le soin sur cet angle, à l’Histoire pour en juger. A coté des faits véridiques endeuillants relatés par le soldat, le narrateur a voulu mettre une place à l’amour, aux sentiments positifs, à travers cette édile pour la Femme, avec un grand F incarnée par YASMINA qui aurait pu s’appeler Lila ou khelidja, ou encore Jacqueline, et résider à Ait El Mansour, Taourirt ou encore Iferhounée, Tifilkout ou Iril El Arbi ou tout simplement Lyon, Marseille, Nantes dans un contexte de paix Cette histoire est le fruit de la pure imagination délirante du soldat français, pour rendre moins pénible, moins cruelle, moins insupportable la vie, quand la mort est devenue la rançon quotidienne pour tous, de quelque coté du conflit où l’on peut se placer. La deuxième partie de ce livre est consacrée aux récits des faits de ces événements à la même période, vu d’un 11 oeil d’enfant innocent, qui n’avait que 4 ans et grandi dans le fracas des armes jusqu’à l’age de 12 ans, pour finir seul, privé de tous ses parents happés par la machine de guerre infernale d’une puissance militaire. Ils sont 8 hommes de la même famille, tous dans la force de l’age, en bonne santé, bien éduqués, lettrés, à être tués par l’armée française, entre 1958 et 1960, tous les armes à la main. Ils étaient, ce que la propagande coloniale appelait « les Fellaghas », et, que l’enfant de la guerre, fils de « fellagha », lui, a toujours pleurés, en secret, dans ses moments de plus grande solitude. Pour lui, il ne subsiste aucun doute : ils sont morts pour leur patrie, en martyrs de la révolution. Cette oeuvre se veut un témoignage fort sur le sacrifice du peuple algérien, le drame des hommes, des femmes et des enfants colonisés, dominés, maltraités, torturés, assassinés. Il est aussi une lueur d’espoir pour les générations montantes de pays développés pour refuser, rejeter le fait colonial et condamner la guerre. Livre 1 Un soldat français m’a raconté… Un épisode de la guerre d’Algérie qui s’est déroulé dans mon village : Iferhounéne (Kabylie 1958-1960) Première partie 17 Insouciance Août 1957, la date fatidique approchait, au mois de septembre je serai convoqué pour effectuer mon service militaire. Ainsi une partie de ma vie s’achevait. Ma bicyclette appuyée contre un arbre de la forêt de Senlis, j’étais allongé sur un tapis de mousse et regardais le ciel bleu azur à travers le feuillage d’un chêne centenaire. Mon enfance me revenait en mémoire, toute ma tendre et heureuse jeunesse passée dans ce quartier populaire de la Villette où se côtoyaient Français, Italiens et Algériens sans grande harmonie mais sans trop de problèmes. Les années de guerre avaient eu raison des petites économies de mes parents, consacrées en grande partie à l’achat de denrées payées au prix fort, qui permirent à ma soeur et moi de nous alimenter à peu près correctement. Les instituteurs de l’école primaire de la rue de l’Ourcq m’amenèrent jusqu’au certificat d’études que j’obtins facilement, mais sans grand mérite, car j’apprenais facilement et souvent mes leçons étaient retenues sur le chemin menant à l’école. J’avais passé avec succès l’examen d’entrée en sixième du lycée Colbert, mais mon père, sachant qu’il ne pourrait faire face à de longues et coûteuses études malgré les bourses délivrées chichement, décida que j’apprendrais un métier manuel. J’avais une préférence pour le métier d’électricien, mais ma brave maman, gardienne d’immeu18 ble, (on disait concierge à l’époque, d’une façon moins péjorative que maintenant) avait l’estime de "ses" locataires et au cours d’une conversation avec une demoiselle de l’immeuble, celle-ci lui fit part des avantages des métiers des arts graphiques. C’est ainsi qu’au mois de septembre 1951 la grande famille des typographes comptait un apprenti de plus. Merci chère maman de m’avoir fait épouser le plus beau des métiers, hélas, obsolète aujourd’hui. C’était le début de ma vie professionnelle, mais je ne quittais pas pour autant l’enseignement général ; tous les mercredis pendant quatre ans, je retrouvais les bancs et ateliers de la prestigieuse École Estienne ; les professeurs nous enseignaient avec autorité et compétence de solides cours théoriques et pratiques sur les métiers de l’imprimerie. Tous les soirs je rentrais chez moi vers 17h30 ; après une rapide toilette, je rejoignais mes copains au café "La Mandoline", c’était notre lieu de rencontre habituel ; le petit groupe que nous formions était sans histoire ; tout le monde nous connaissait, les quelques voyous du quartier eux-mêmes nous saluaient, nous avions usé nos fonds de culottes sur les mêmes bancs d’école ; pour eux, nous faisions partie du paysage depuis toujours et ils nous fichaient une paix royale. Nous avions de bons rapports avec les Italiens et les Maghrébins qui malgré leur nombre élevé se faisaient discrets. Après avoir dégusté une ou deux boissons non alcoolisées (le lait grenadine était très à la mode à cette époque), nous "montions" nonchalamment jusqu’au métro "Crimée" pour y retrouver d’autres copains et surtout nos chères copines… J’étais très amoureux de Denise. Avec le recul je pense qu’il s’agissait plutôt d’attirance physique ; ce sentiment qu’inspire une jolie fille de dix-huit ans à un

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